vendredi 31 décembre 2010

Partir nulle part

          

            Nous voilà seuls étrangers dans le bus qui nous transporte lourdement vers là où nous voulons aller, quelque part loin d'ici. La décrépite et malade Salvador nous semble déjà loin à quelques kilomètres de son centre suintant la tristesse et cette odeur putride d'une ville qui a perdu confiance qui s'accroche à tout prix à son passé glorieux qu'elle gâche, qu'elle cache. Le présent de Salvador survit malade de son passé.
A chaque arrêt au bord d'une favela la même scène, la même valse de beaux jeunes hommes noirs qui frappent au carreau pour nous vendre de tout petits riens. La scène comique se transforme à chaque fois plus en une représentation fade, dramatique, larmoyante d'une jeunesse condamnée à nous faire croire qu'elle vend du bonheur en boite, en bouteille, en sachet. C'est du vent qui sort des ces boites qui souffle vers là bas où l'on doit aller, loin de ce simulacre . Salvador l'enchanteresse est devenue charlatan.

La route se durcit et le soleil rend de plus en plus aride les terres qui nous entourent. Le rouge remplace le vert, derrière la ville alimentée par les sillons de ces champs qui ne se remplissent jamais, jamais d'eau. Le rouge des collines, les premières grandes exploitations et ces enfants noirs au bord de la route, et blancs dans leur voiture et puis le rouge, le jaune et le rouge encore, de ces champs qui ont tué, encore marqués de cette histoire que l'on tente d'oublier.
Le sertão est là, ce quasi désert approprié par ces européens qui n'ont rien eu sur le littoral qui n'ont pas désespéré, certains de pouvoir vivre au milieu des cactus à l'ombre du vol lent des urubus.
Les premiers cow-boys apparaissent sans la grâce hollywoodienne mais palpables, réels presque trop vrais pour y croire. La musique presque country, les motos trop bruyantes et ce regard noir profond, strident, insensible au soleil qui a pourtant déjà tout brulé.
On ne sait pas où l'on se trouve, au milieu de nulle part en allant vers Serrinha notre possible destination, un lieu qui a résisté au temps, autant qu'il a pu.  



Ces musiques qui marquent un voyage :

The Budos Band - Chicago Flacon

Trombone Shorty & Orleans Avenue - One Night Only

vendredi 3 décembre 2010

Rhétorique irakienne.

Mes chers compatriotes !

«  Ce jour est historique pour notre ville, notre Etat, notre peuple. La République, la démocratie, la liberté ont aujourd'hui brisé le joug d'hommes sans foi ni loi qui détruisaient les espoirs d'une nation entière.
Il est temps de barrer la route à l'ignominie, la violence et l'infamie qui ont conduit inexorablement, inlassablement depuis vingt ans aux atrocités que nous connaissons. Ces atrocités elles n'existeront plus à partir d'aujourd'hui.
Considérons cette date comme le D-Day de notre lutte pour l'expansion des droits de l'homme. Ce que nous démontrons au pays, au monde mais surtout à nos adversaires c'est que nous sommes forts et que la force est intransigeante. La force est intransigeante d'autant plus qu'elle est mue par la vérité, la croyance en un avenir meilleur et par la certitude que grâce à nous tous, à notre effort commun, nos enfants vivront dans un monde plus sûr.
La bataille qu'a menée nos forces armées ( parachutistes, fusilleurs et police) hier et aujourd'hui est la preuve que nous sommes puissants, que notre Etat ne se laissera pas marcher dessus par des chefs illégitimes qui ne fondent leur pouvoir que sur l'oppression.
La guerre que nous entreprenons sera sûrement couteuse et éprouvante sur le moment mais les bénéfices de demain ne vaudront-ils pas au centuple le sacrifice d'aujourd'hui ?
Quand je vois le magnifique drapeau de notre pays flotter en haut de la colline, sur le toit du palais que s'étaient construits ces chefs de guerre grâce à l'argent sale, détourné de vos poches et des caisses de l'Etat, je ne peux m'empêcher d'y voir l'image d'un futur doré pour nous tous.

Que Dieu vous protège. Vive la démocratie! Vive la République! »


Ce discours est fictif ou peut être celui de Sérgio Cabral ( Gouverneur de Rio) cette semaine ou de George.W.Bush. En 2003.